Partir du réel – un regard sur le travail effectué par les élèves de 1ère spécialité arts plastiques et les étudiant.es de la classe prépa

Les élèves de 1ère spécialité arts plastiques et les étudiant.es de la classe prépa arts ont mis au point en partenariat avec le FRAC Poitou-Charentes une exposition dont ils ont été les co-commissaires et médiateurs dans le cadre du dispositif TANDEM.

1. Les étudiant.es de la classe prépa ont écrit des notice venant relier les œuvres à la thématique du réel.

Vincent Chhim (né en 1969 à Paris, vit à Paris), Le Dépeupleur, 1996-1997, peinture acrylique sur toile, 100 x 100 cm, collection Frac Poitou-Charentes

Cette peinture commence à naître dans les années 70 vers ses six ans lorsque Vincent Chhim s’amuse à découper des photos dans des journaux. Il tombe alors sur le portrait d’un responsable nazi, il gardera le document toutes ces années durant et l’utilisera pour réaliser l’œuvre entre 1996 et 1997.

Il s’agit donc d’un portrait d’un mètre sur un mètre, une peinture de style assez académique par la technique de l’acrylique quant au traitement réaliste de certaines parties de ce visage. C’est un tableau neutre constitué par des aplats de couleurs pastels qui forment une association doucement agressive.

Ce fond, d’apparence simple et anodin laisse apparaître le quadrillage sous-jacent d’une mise au carreau, une méthode académique utilisée par les plus grands peintres pour respecter les proportions du modèle. L’aplat vert pastel amène un sentiment de confort et de douceur qui se retrouve perturbé par l’homme en plein milieu, ainsi que par la couleur rosée de sa peau et de son torse orangé. L’accoutrement du personnage est mystérieux car il n’y a pas de concordance entre les ombres et les lumières. Ce non-habit lui retire un ancrage au réel, le libérant de toute affiliation à un corps de métier ou une classe sociale.

Ce visage troublant attire notre attention, il semble humain à première vue mais au fil des minutes, l’étrangeté se dégage de plus en plus du personnage. Les lumières et ombres incohérentes nous questionnent sur la source de la lumière, amenant une ombre massive sur son front qui laisse apparaître des couleurs inattendues. Comme certaines zones telle que la transition avec l’implantation capillaire reculée, il laisse apparaître une transparence.

Ses traits sont déformés et s’éloignent de l’humain, c’est un visage évocateur mais éloigné ; ses oreilles sont pointues, sa bouche dénuée de lèvres est droite et fermée, comme son nez anormalement droit. On observe l’absence de sourcils et de cils.

Le plus troublant se trouve au niveau de ses yeux. L’œil droit semble absent et distrait, il s’écarte. L’œil gauche en revanche se place au centre du tableau et scrute l’observateur. C’est un œil admoniteur qui lance un appel. Il attend le jugement du spectateur qui jongle entre tout et rien.

 La neutralité du tableau amène à l’ambiguïté entre le sujet du portrait et son apparence innocente, générique et inhumaine. Finalement, le tableau questionne la moralité et le phénomène qui se produit lorsque l’observateur apprend la monstruosité du personnage.

Diane, Floriane et Gabriel

Morgane Denzler, Fin du Jeu,2011, installation, impression numérique, 100 x 150 cm, broderie sur tissu, 100 x 87 cm, protocole d’installation, collection Frac Poitou-Charentes

Fin du jeu, une installation de Morgane Denzler réalisée en 2011 entretient plusieurs liens avec cette thématique de la relation au réel.

Morgane Denzler commence son projet en 2011 alors qu’un conflit opère dans le pays, lorsqu’elle rencontre une famille libanaise à Beyrouth.

Cette œuvre est composée d’une photographie et d’un drap. La photographie induit donc un premier rapport à la réalité puisque c’est une représentation « directe » de celle-ci. Son association au drap disposé dans l’espace, l’ancre encore davantage dans le réel, car l’inscrit directement dans notre contexte spatial. L’œuvre entretient donc un fort rapport matériel car elle joue sur ces 2 dimensions plastiques (bidimensionnalité et tridimensionnalité).

La photographie de la terrasse de cette famille est prise en plongée. On la voit alors du dessus nous laissant découvrir la trace saillante d’un trou d’obus ayant été rebouché au milieu de l’espace. À première vue, cette photographie paraît abstraite et peut faire penser à une écorce ou encore à une peinture. Seuls quelques éléments de l’image nous font comprendre son rapport à la thématique, notamment les plantes en bas à droite, le fil à linge ou encore le tuyau d’arrosage nous donnant quelques repères et échelle. Cette dimension quasi-abstraite de la photo institue donc un rapport différent à la réalité car nous en éloigne au premier abord pour nous en rapprocher ensuite. Le drap au sol, semble donc s’être échappé de la photo, s’être matérialisé dans l’espace afin de nous ouvrir les yeux sur une guerre violente, présente partout : c’est notre réalité contemporaine et l’œuvre nous y oppose. Le texte sur le drap accentue ce rapport au réel car ce sont les paroles d’un enfant de la famille que l’artiste a rencontré : « tu vois le trou qu’il y a dans la terrasse en bas, pour nous ça a marqué la fin des parties de foot. Un obus est tombé là, on n’est plus retourné jouer au foot. ».

Celui-ci nous éclaire sur la réalité de l’œuvre et de la guerre : c’est ce qui met fin à une période, ce qui nous éloigne de la vie quotidienne, de nos habitudes, ce qui détache de l’enfance et de l’innocence du jeu en confrontant à cet environnement hostile.

L’artiste comme nous, fait donc face à la réalité brutale de ce conflit politique et cherche à nous y confronter à travers son installation incisive qui part du réel en tout point.

Kym, Rebecca, Océane

Jakob Gautel (né en 1965 à Karlsruhe, Allemagne, vit à Paris). Sven et moi (selfie)de la série Le Bauhaus en héritage, 2017, photographie couleur, 48 x 36 cm, collection Frac Poitou-Charentes

Sven et moi (selfie), de la série Le Bauhaus en héritage, est un travail photographique qui rapproche dans un même espace, passé, présent et futur. L’artiste insère, dans un selfie numérique présent, une image passée d’un ancêtre. Ce photomontage apporte une vraisemblance d’incrustation du grand-père de l’artiste, qui existe sur le même plan que son petit-fils, sans tomber dans l’illusion réaliste (la relation à la couleur et au noir et blanc photographique, la main de l’artiste se fondant dans l’épaule de son aïeul…) L’œuvre de Jackob Gautel se base sur le concept de l’héritage et de la redécouverte d’une réalité collective oubliée. Ce travail part d’une histoire passée, celle de ses grands-parents. En effet, il découvre à travers des photos et des écrits que ceux-ci ont fait partie de l’école du Bauhaus. Cette information et les images documentaires de cette époque sont le point de départ d’une recherche artistique où il va se représenter, par des photomontages, auprès de ses grands-parents, enlaçant son héritage.

Jakob Gautel apparaît ici aux côtés de son grand-père et tous deux ont le regard tourné vers l’appareil photo. Trois éléments se juxtaposent : le grand-père de l’artiste, ancré dans le passé, l’artiste qui se photographie et l’appareil photo. Ces trois niveaux de lecture font chacun écho à une temporalité : le passé, le présent et le futur, vers qui tous les regards sont tournés (celui de Jakob Gautel, de son grand-père ainsi que le nôtre).

L’artiste fait ainsi apparaître une mémoire personnelle en plus de celle du pays dans lequel il a grandi, l’Allemagne. Le Bauhaus, avec lequel il entretient de forts liens, est ici exploré comme un passé du pays germanique, un pan de la culture renié et blâmé par l’histoire, notamment par le parti Nazi.

Maële et Joschka

Athi-Patra Ruga, The Naivety of Beiruth #1, photographie lightjet print, 74 x 107 cm, 2007, collection Frac Poitou-Charentes

Né en Afrique du sud en 1984, Athi-Patra Ruga est un artiste plasticien queer avec une pratique qui s’oriente autour des médiums de la photographie et de la performance.

The naivety of Beiruth #1 fait partie d’une série de photographies issues d’une performance où il se met en scène dans la peau d’un personnage féminin nommé Beiruth. Le nom est une référence directe à la ville de Beyrouth, capitale du Liban, et son contexte de guerre mais fait aussi écho au personnage de Ruth dans la Bible, une femme qui intègre avec difficulté le peuple israélien. Cette référence nous ramène au sentiment d’être étranger dans un pays qui n’est pas le nôtre ou qui nous rejette.

L’artiste crée sa propre mythologie autour de ce personnage, comme un alter ego féminin, dans un univers, un pays imaginaire dénommé l’Azania (dont le nom est inspiré de textes de Pline l’Ancien qui utilisait celui-ci pour désigner une partie de l’Afrique orientale) .

Il met en parallèle le statut d’étranger, et celui de la femme dans des pays où règnent la violence et l’insécurité. Particulièrement en Afrique du Sud, où des féminicides ont lieu parfois sur le simple motif de choix vestimentaires.

Mi-monstre, mi-femme, mi-guerrière, les cheveux sont utilisés comme marquage de la féminité et de la séduction, cette chevelure peut autant être protection que prison lorsqu’on est une femme. Le casque, ainsi que la posture peuvent aussi être synonymes de défense envers ce monde hermétique.

Dans le cadre de l’exposition Partir du réel, l’œuvre s’inscrit dans le témoignage d’une situation réelle, celle d’être une femme dans une société oppressante tout en développant un univers imaginaire. Celui-ci est aussi une autre manière de transposer la réalité, et pourtant, cette divagation, cet éloignement, est un reflet de mœurs actuelles.

La confrontation entre le contexte d’une performance ayant réellement pris place dans l’espace public et l’étrangeté de ce personnage, crée une tension entre réel et imaginaire qui traverse cette œuvre de l’artiste sud-africain.

Maya et Lisa

Kristina Solomoukha et Paolo Codeluppi, (nés en 1971 à Kiev et en 1974 à Singapour, vivent à Paris et Bagnolet), Lux Bella Rocca, 2013, vidéo, son, 3 minutes, collection Frac Poitou-Charentes

En collaboration avec le lycée René-Josué Valin et le Fonds Régional d’Art Contemporain (FRAC) de Poitou Charentes, l’exposition A partir du réel questionne notre rapport au monde et à l’imaginaire.

Lux Bella Rocca est une œuvre réalisée par Kristina Solomoukha & Paolo Codeluppi à l’occasion d’une résidence organisée par le FRAC Poitou Charentes en 2013 en pays civraisien, une région naturelle au sud de la Vienne. Entre géologie et urbanisme, ce duo d’artistes s’intéresse aux différents paysages à travers lesquels ils se véhiculent pour documenter le mystère de ces espaces et l’ancrage du monde humain.Les deux artistes ont joué un rôle d’explorateur.ice.s : ils ont découvert un pays inconnu.

Lux Bella Rocca dévoile, par la vidéo, un paysage forestier calme mais perturbé par des projections lumineuses colorées, qui se reflètent sur les parois d’une grotte.

Par ailleurs, un sentiment de curiosité envahit le « regardeur », il s’interroge sur ce qu’il y a à l’intérieur. La dissonance – entre la ruralité et l’urbanité – est renforcée par la présence d’un son mi-techno mi-tribal. Ce dernier entraîne une atmosphère rythmique, apaisante ou au contraire oppressante et étrange.

 De plus, rien ne permet de savoir si la lumière projetée dans la grotte se trouve «physiquement » dans celle-ci lors de la captation ou si elle est rajoutée en post-production ? Par conséquent, qu’elle est la place de la documentation et de la falsification dans cette œuvre ? Si les deux artistes rendent compte, témoignent, documentent le pays Civraisien tel qu’ils l’ont « découvert », ils ont eu aussi la possibilité de le modifier, de le transfigurer. Alors que croire ? Lux Bella Rocca interroge donc le regardeur sur sa perception de ce qui relève du réel et de l’imaginaire.

Lux Bella Rocca est une œuvre à la fois locale et fantastique !

Léna, Romane et Elise

Erwan Venn, né en 1967, vit à Bordeaux, Séminaristes, 2012, impression numérique contrecollée sur dibond, 110 x 74 cm, collection Frac Poitou-Charentes

Les séminaristes est une œuvre tirée d’une série d’impressions numériques réalisées en 2012 par Erwan Venn.

Lors d’une recherche dans le grenier de sa famille, l’artiste y trouva des archives photos de ses grands-pères, séminaristes, qui pendant la 2nde guerre mondiale faisaient partie de Breiz Atao (mouvement d’extrême droite breton).

Erwan Venn apprenant notamment que ses grands-pères avaient collaboré avec des nazis pour les ravitailler en vin, décida de reprendre les photos et de les détourner en effaçant toutes les parties du corps des personnes présentes sur la photo, ne laissant que les vêtements flottants dans le vide donnant aux personnages un aspect fantomatique pouvant nous rappeler les surréalistes. Cette action sur l’image renvoie à la tradition de retouche de l’image propre à la photographie. Le procédé plastique déplace l’argentique vers le numérique qui est par la suite imprimé sur un support solide. Ce choix propose un visuel presque onirique donnant l’impression que la nature de la photo n’a jamais existée.

Ce contexte place directement l’œuvre dans une relation à l’effacement qui est à la fois historique mais également personnelle. Tout à la fois référence à la Damnatio memoriae, ancêtre même de la censure politique telle que nous la connaissons aujourd’hui à travers l’histoire des régimes totalitaires soviétiques et nazis, elle est aussi le refus d’hériter de ce passé familial.

Cependant Erwan Venn a mis en scène son effacement en laissant une « apparition volontaire ». Au lieu de faire totalement disparaître les corps, il affirme leur absence en rendant visible l’acte de l’effacement. C’est un effacement qui est pour autant une affirmation.

Dans cette œuvre qui s’appuie sur un document que l’artiste tort, Erwan Venn se réapproprie l’image d’un passé familial existant en l’éloignant de son contexte.

Lorelei et Capucine

2. Les élèves de 1ère spécialité ont écrit des scenarii de médiation organisés de manière thématique.

Partir du Réel, vernissage du 20 janvier 2025

Histoire et histoires

            César né en 1921 est un artiste du mouvement des Nouveaux Réalistes qui s’est développé dans les années 60, et qui comprenait notamment Raymond Hains, ou encore Yves Klein. On lui doit les statuettes en bronze de la cérémonie des Césars. Il s’est illustré en tant qu’artiste grâce à ses compressions, de voitures et d’objets . Ainsi Compression, réalisée en 1967, composé d’ustensiles de cuisine en aluminium, créée à l’aide d’une presse hydraulique, propose une réflexion sur la matière en donnant une seconde apparence à ces objets banals, une révolution historique dans le monde artistique.

            Née en 1986,Morgane Denzler a basé la plupart de ses réflexions artistiques sur les thématiques de l’architecture et des ruines, en particulier celles de Beyrouth. Dans Fin du jeu datant de 2011, à première vue, on pense à une peinture, en réalité c’est une photographie, celle d’un trou d’obus à Beyrouth. L’œuvre est composée de la photographie et d’un voile de tissu brodé posée au sol. La photographie est celle de la vue qu’elle avait depuis son balcon durant son séjour. Les paroles de son jeune voisin sont brodées sur le tissus. Il lui a expliqué que ce cratère d’obus à détruit le terrain où il jouait au foot avec d’autres enfants autrefois. Cette œuvre raconte la réalité, celle de la ville de Beyrouth avec tous ses traumatismes et ses séquelles.

            The Naivety of Beiruth #1. Ce titre fait évidemment penser à l’œuvre précédente. Elle a été réalisée par Athi-Patra Ruga, un artiste sud-africain né en 1984. Il a réalisé des créations textiles, des sculptures, des photographies ou encore des performances. Sa marque de fabrique est l’univers utopique qu’il a imaginé : l’Azania. Le personnage présent sur cette photo, Beiruth, fait partie de ce monde chamarré, mystérieux, intriguant, une histoire mythologique et militante.

            Sven et moi. Jakob Gautel né en 1965, se questionne sur l’identité et l’image grâce à sa série : Le Bauhaus en héritage. Il tente de comprendre une histoire familiale. Celle du Bauhaus au travers des yeux de ses grands-parents. Dans cette œuvre de 2017 : un selfie de lui dans lequel il a incrusté une photo de son grand père (Sven). Jakob Gautel fait se rencontrer le passé et le présent qui semblent regarder ensemble vers le futur.

 Manon, Naia, Shanti

Une idée de malaise

            En partant du réel, une sensation de malaise se dégage des œuvres.

Devant le dépeupleur de Vincent Chhim lors de la préparation des médiations

            Erwan Venn avec Les Séminaristes, perturbe notre regard. En numérisant une archive familiale, en effaçant leurs corps, l’auteur semble nier et dénoncer en même temps ces protagonistes aux idéologies fascisantes.

            A travers Le dépeupleur de Vincent Chhim, nous retrouvons également cette sensation de malaise dans le portrait anonyme d’un responsable nazi à l’apparence très dérangeante.

            Cette violence dissimulée se retrouve dans l’installation de Morgane Denzler sur un terrain de jeux d’enfant détruit par la guerre à Beyrouth

            L’œuvre Sven et moi de Jakob Gautel est une photographie en couleur intégrant son héritage personnel du Bauhaus, interrogeant la place de l’Homme dans le temps.

Note : de retour dans l’actualité : la récente polémique sur le Bauhaus, la montée néonazie en Allemagne, le retour de la guerre à Beyrouth, montrent que le malaise persiste et qu’il est bien réel.

Emma, Agathe, Léa, Juliane, Ambre.

Dénaturer la réalité 

            César est un artiste du Nouveau Réalisme qui s’est fait connaître avec sa technique de compression d’objets. Après la compression, les objets qui composent l’œuvre perdent leurs fonctions originelles, comme une version déformée de la réalité.

            De même, Vincent Chhim avec Le Dépeupleur   nous montre un homme aux traits abstraits qui semble, sans vie ni d’émotions, dépourvu d’une nature humaine.


            L’œuvre The Naïvety of Beyruth, de Athi-Patra Ruga dépeint une figure mystérieuse dont le corps masqué nous laisse penser que ce n’est pas humain. Cette œuvre met en perspective la notion d’identité de la nature humaine, les questions ou contradictions qui s’y rapportent.

Souvenir et mémoire


            La photographie, est l’instrument qui capture un instant du réel.

Devant l’œuvre de Morgane Denzler

 Erwan Venn  retrouve une série de photos provenant de son grand-père, prêtre séminariste. Venn décide alors d’effacer les humains de ses photos ne laissant de souvenirs que leur vêtements.


Cette question du souvenir nous la trouvons chez Jakob Gautel dans son œuvre Sven et moi. Il se met en scène avec son ancêtre comme un selfie au travers du temps.

Un travail de mémoire  également pour l’artiste Morgane Denzler. Avec Fin du jeu, on observe une photo d’un cratère sur une terrasse et un drap déposé sur le sol où il est écrit l’histoire de ce cratère et plus précisément son impact sur la vie d’un enfant.

Kristina Solomoukha et Paolo Codeluppi nous montrent, avec Lux Bella Roca, un infra monde illuminée de l’intérieur accompagné d’un bruit inquiétant de percussion. Cette œuvre sourde et obscure nous laisse face à la mémoire secrète d’un inconscient collectif.

Popeline, Kiara, Eloane, Kaïs.

Dualité

            On peut considérer deux interprétations dans l’idée de Partir du réel.

Premièrement l’utiliser comme point de départ pour créer et deuxièmement partir de la réalité pour mieux s’en éloigner.

            Que nous évoque Le dépeupleur ? En réalité cette œuvre en apparence très lisse de Vincent Chhim représente un homme qui a réellement existé. Derrière ce masque à visage humain se cache un général nazi…

            Sven et moi est un photomontage de Jakob Gautel. L’artiste est aux cotés de son ancêtre, une figure du Bauhaus. Si leur rencontre semble réelle un court instant, cette impression disparaît lorsque l’on comprend qu’ils n’ont pas vécu à la même époque.

            Contrairement à Jakob Gautel, Erwann Venn, le créateur de cette œuvre : Séminaristes, semble ressentir une honte certaine quant à son histoire. En effaçant les corps, mais en gardant les costumes il parvient à nous mettre face à une sensation de présence/absence.

            De façon similaire on constate une présence non humaine, celle d’Athi-Patra Ruga, avec The Naïvety of Beiruth. Une entité presque primitive et multiple, dans sa posture ambiguë qui vacille entre défense et conquête

Louison, Metchy, Jean, Timéo 

Étrangeté

Emilie Mautref du FRAC lors de la médiation aux étudiant.es de la CPES-CAAP devant l’œuvre de Erwan Venn

            Chez Vincent Chhim et Le Dépeupleur, le portrait paraît à première vue assez étrange. Malgré la forme humanoïde du personnage, son expression faciale est intrigante et déconcertante. C’est peut-être dû en partie à ses yeux, notamment celui de gauche qui vise directement le spectateur et joue avec sa perception.

Morgane Denzler dans Fin du jeu a photographié une scène bien réelle mais qui paraît plutôt abstraite. Ici la transformation du réel passe donc par une approche plus poétique en capturant un instant où quelque chose s’est terminé : une vue de la terrasse d’une famille libanaise autrefois animée par le jeu. Un moment figé dans l’éternité.

 Avec The Naivety of Beiruth, l’artiste Athi Patra Ruga transforme la situation politique et sociale d’un pays. Il réinterprète l’histoire et ses traumatismes en leur donnant une forme hybride. Une utopie où l’on ne distingue plus la frontière entre le monde réel et l’imaginaire

 Les Séminaristes d’Erwan Venn, nous plonge dans un univers où le réel semble troublé et en lien avec la mort… On peut imaginer qu’effacer totalement les corps de ces hommes pour les rendre fantomatiques est une façon de punir ses ancêtres pour leur idéologie dangereuse.

 Chez Kristina Solomoukha et Paolo Codeluppi, la grotte mystérieuse de Lux Bella Roca, le jeu de lumière et le bruit de la boîte à rythme nous montrent une vision archaïque, entre le fantasme de ce qui peut se tapir dans l’obscurité d’un lieu pourtant existant, et une sensation d’inquiétante étrangeté.

Lily, Malya, Robin, Pablo, Alice, Thiffany

Différents médiums

l’exposition en cours de montage

            L’exposition Partir du Réel regroupe un ensemble d’artistes qui nous proposent une réflexion sur le réel à partir de plusieurs supports d’expression, comme la photographie, la peinture ou encore l’installation et la vidéo.


            Lux Bella Rocca  de Kristina, Solomouka et Pablo Codeluppi. Cette vidéo date de 2013. Habitués à ce qu’une vidéo présente des images en mouvement, on est surpris par la découverte  d’un plan fixe. Mais une lumière changeante, ainsi qu’un son continu semblable à celui d’un battement de cœur donne une impression de vie souterraine.


            Vincent Chhim, artiste peintre à réalisé le tableau Le dépeupleur . C’est un portrait d’un dignitaire nazi anonyme, réalisé entre 1996 et 1997. Sa composition faite d’aplats colorés et de modelés curieusement agencés, remet en question notre perception de l’art pictural.

 
            Dans le principe  de la retouche photo, une œuvre de Jakob Gautel intitulée Sven et moi de la série Le Bauhaus en héritage . Jakob Gautel cherche à mettre en parallèle son passé et son présent par une technique numérique superposant d’anciennes photos de famille à son autoportrait.

            Dans cette continuité,  Erwan Venn et sa photographie retouchée datant de 2012 intitulée  Les Séminaristes . L’ absence de visages rend les personnages oubliables mais ils restent inscrits dans l’histoire car provenant d’archives anciennes et familiales.

            Une autre photographie, plus “ancienne” qui date de 2007, The Naivety of Beiruth d’Athi-Patra Ruga. Ici pas de retouches numériques mais une posture et une composition originale d’un personnage chimérique issu du monde imaginaire de l’artiste.

            Une photographie aussi pour Morgane Denzler mais avant tout une installation complété par un drap brodée. Fin du jeu, une œuvre a plusieurs dimensions qui a pour but d’évoquer les évènements durant la guerre à Beyrouth.

            Enfin, nous finissons avec la compression du célèbre artiste des nouveaux réalistes : César. Une compression de plusieurs objets nous montre comment la matérialité détournée de simples objets du quotidien peuvent prendre une nouvelle dimension sculpturale.

Sukiane, Luna, Lucie, Malaury, Eléonor

De l’imaginaire à la réalité matérielle

Autour de la compression de César

            Cette exposition est composée de huit œuvres et à été réalisée en partenariat avec le FRAC Poitou-Charentes (Fonds Régional d’Art Contemporain). Pour en présenter quelques unes :

            Lux Bella Rocca, Kristina Solomonkha et Paolo Codeluppi :

mettent en scène une grotte dans laquelle on remarque des jeux de lumières accompagnés de son. Un appel à l’imaginaire, féerique et mystérieux.

            The Naivety of Beiruth, Athi-Patra Ruga :

            Une œuvre photographique qui représente l’artiste lui même. A travers ses créations textiles et autres expérimentations artistiques, Athi-Patra Ruga invente un monde : l’Azania. Une mythologie personnelle pour conjurer les clivages, notamment ceux du genre.

            Sven et moi , Jakob Gautel :

Dans la série  Le Bauhaus en héritage de Jakob Gautel, la photographie et ses artifices deviennent le lieu virtuel d’une introspection sur sa famille et son passé où les rêves peuvent devenir réalité

            Fin du jeu, Morgane Denzler :          

             Le rapport du temps et à l’éphémère se retrouve dans cette œuvre : un protocole d’installation fait que l’œuvre photographique est détruite à chaque exposition, impliquant de nouveaux tirages par la suite.Cette œuvre réalisée lorsque l’artiste était étudiante aux Beaux-Arts de Paris, lui a permis de rencontrer la population de Beyrouth au Liban sur fond de la réalité de la guerre. En habitant l’espace de la galerie, l’installation rencontre la réalité du spectateur.

            Toujours sur le thème de la guerre, Erwan Venn réalise en 2012 une impression numérique plus particulièrement des archives d’un de ses ancêtres. Dans celle-ci, les séminaristes, il s’attelle à effacer les corps pour gommer en quelque sorte une réalité trop dure.

Enfin Compression de César nous met face à la matérialité dure et bien réelle du métal comprimé.

Jade, Jade, Lou, Solène, Louna

Perte d’identité

            Partir du Réel , c’est en fait s’éloigner de notre réalité.

 Au travers des découvertes technologiques de la représentation, notre perception de la réalité n’a fait qu’évoluer depuis des milliers d’années, elle ne cesse de se transformer et de nous faire perdre nos repères.

            Lux Bella Rocca de Kristina Solomoukha et Paolo Codeluppi, en 2013, jette des liens possibles entre 2 réalités ; celles d’époques préhistoriques révolues, où la nature avait sa place et celle d’aujourd’hui, empreinte de technologies. En combinant une grotte, des lumières et de la musique, cette grotte discothèque devient un objet non identifié.

             Compression réalisée en 1967, César a utilisé des ustensiles de cuisine pour les compresser et donner forme à autre chose : les théières et les passoires ont perdu leur aspect premier et ont pris la forme d’un curieux monolithe.

            Dans la photographieThe Naivety of Beiruth d’Athi-Patra Ruga. la question du genre et de l’identité est au cœur de son travail. Le personnage a perdu de son identité… homme, femme, androgyne, animal…il restera dans anonymat.

            Le dépleupleur, de Vincent Chhim nous donne à voir un homme, sans expression ni humanité. On sait qu’il fut un nazi, pourtant l’auteur a tenu à le garder anonyme.

             Pour Les Séminaristes, d’Erwan Venn, sans doute l’artiste souhaitait en quelque sorte fuir le passé. Il a gommé les personnages effaçant du coup leur identité humaine.

Maeva, Margot, Océane, Héléna, Laly, Robin

Les professeurs (Fabrice Mignonneau et Ronan Marec) ainsi que les élèves (les deux classes de 1ère spécialité arts plastiques ainsi que les étudiant.es de la classe prépa arts) remercient le FRAC Poitou-Charentes, sa directrice Irene Aristizábal, Stéphane Marchais, chargé des publics et des partenariats éducatifs, Emilie Mautref, chargée de médiation, Régis Fabre, chargé de collection, Claire Durquéty, régisseuse ainsi que Axel Renaux, professeur d’arts plastiques, chargé de mission au Service Educatif.